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C'est ni fait, ni à faire!
6 avril 2007

Vie de militant(e)

Un jour, fatiguée de pleurnicher de dépit devant la grand-messe du 20 heures, de conspuer le monde entier, bref de râler entre mes quatre murs, j'ai voulu changer le monde avec mes petits bras musclés et mes idées révolutionnaires et j'ai donc poussé la porte d’un parti politique, dont je partage (un minimum quand même) les convictions. Un parti de gauche pour ceux ou celles qui n’auraient pas encore compris. « Rhâaaaaaaaa ! », me direz-vous, « mais qu’es-tu allée faire dans cette galère ???? »

Oui, je sais. Mais je suis une romantique-utopiste invétérée. Le temps des cerises, l’internationalisme, la paix dans le monde, tout ça. On ne se refait pas.

Après avoir prouvé en détaillant mes opinions et mes aspirations  que je n’étais pas entrée là seulement parce qu’il y avait de la lumière, je fut conviée au nombreuses activités ludiques proposées par le GO, que l’on appelle communément ici le « secrétaire de section ».

Au delà des joyeux rassemblements de militants où on se claque la bise avant de se chamailler et dont je parlerai une autre fois peut-être, les campagnes se mènent sur le terrain. C’est bien connu, la campagne d’Italie ne s’est pas gagnée dans une salle de réunion.

Sur le terrain, donc. Qu’il vente, qu’il pleuve ou qu’il neige. Dehors. Et tant qu’à faire, dans des lieux de passage.

Je dois reconnaître ici mes faiblesses en terme d’approche du badaud. J’ai à plusieurs reprises tenté d’alpaguer gentiment le promeneur, désolée d’interrompre sa rêverie solitaire. En vain.

Certains, mal embouchés, de mauvaise humeur ce matin là, pensent que vous êtes un putching-ball sur lequel ils vont pouvoir déverser leur haine et leur fiel. Vous vous faites donc enguirlander alors que vous êtes éveillés depuis peu et que vous pensez, de bon coeur, que le dialogue est essentiel.

D’autres pensent que vous tenez une permanence gratuite de psychanalyse et s’épanchent sans fin sur leurs problèmes de chaudière ou de divorce mal géré.

Le pire reste quand même les passants –ceux qui portent si bien leur nom- et qui pensent que vous n’existez pas, n’hésitant pas à vous bousculer au passage, vous obligeant à vous prendre les pieds dans la poussette qui passait par là et à donc à vous faire de nouveau renvoyer dans vos buts par une maman courroucée.

Bref, n’entrevoyant pour ma part que des aspects négatifs à la distribution de tracts et n’ayant pas la patience ni la tolérance de certains de mes camarades, j’interrompis tout net cette activité, fort utile au demeurant. (oui il y a des gens qui sont talentueux pour haranguer la foule, parler au chaland qui trainait par là. Je ne suis malheureusement pas de celà. Trop impressionnable peut-être?)

Je fut donc redirigée vers une activité plus confidentielle mais tout à fait passionnante : le collage d’affiches.

Je m’explique.

Certains soirs, nous nous réunissons à quelques uns et arpentons les rues de notre quartier armés de seaux de colle à papier peint et d’affiches à la gloire du ou de la candidat(e).

On se partage le territoire, on repère les murs ou palissades autorisés, du moins tolérés, et on colle. Point de verre pillé derrière les affiches, pratique peu reluisante de temps politiques plus anciens, l’ambiance est plutôt bon enfant.

On ne peut pas dire que je sois très adroite à ce type de travaux pratiques. On pourrait même affirmer sans exagérer que j’ai deux mains gauches.

Mes cahiers, même ceux d’apparat, les cahiers de leçons, ont toujours ressemblé à de vulgaires cahiers de brouillons, j’ai toujours débordé en coloriant et je ne sais pas découper droit.

Et je n’ai jamais, ô grand jamais, été capable de coller un lai de papier peint droit sans me débattre plusieurs heures avec le rouleau récalcitrant, m’encollant les mains et les cheveux au passage.

Mais là, l’exercice est moins exigeant. Enfin, pas trop. J’ai toujours le chic pour faire équipe avec un des quelques ayatollahs de l’affiche bien alignée et de la colle bien utilisée! Si cet équipage étrange donne lieu à quelques chicaneries, personne ne m’a encore sortie son niveau de maçon ou son fil à plomb pour vérifier la qualité de mes collages !

Je suis aussi spécialiste des maladresses en tout genre qui rendent ces séances de collages bien joyeuses mais totalement inefficaces : oublier un pinceau à colle dans la rue (« Oups ! C’était où déjà ? »), coller une affiche à l’envers (j’ai toujours été convaincue qu’il fallait voir le monde sous un autre angle !) ou renverser le pot de colle par terre dix minutes après le début de l’opération, soit le temps de coller deux pauvres affiches…

Je ne suis pas très fière de mes bêtises et je crois n’avoir aucun talent pour ces travaux manuels, et pourtant, habitée par un étrange masochisme, je suis présente dès que je le peux.

D’une part, parce que ces collages, s’ils sont sportifs, préservent ma tension et ma santé mentale. Ce qui n’est pas le cas de la distribution de tracts, qui me rend dingue et me met à chaque fois sur la voie du court séjour en chambre capitonnée.

Ensuite, je ne veux pas me complaire dans le débat intellectuel, qui s’il peut être utile et stimulant, ne témoigne pas vraiment de l’engagement. C’est si facile de faire campagne, de se dire militant quand on ne va pas à la rencontre d’autrui, quand on n’agit pas !

Enfin, peut-être est-ce la nostalgie de l’enfance mais je trouve cela tout particulièrement réjouissant de rentrer à la maison, les mains sales, les cheveux emmêlés et gluants, les chaussures collant au sol, les vêtements tâchés et d’observer l’air désespéré du Toudoux !

« Ben quoi ? J’t’entraîne en attendant que le petit nounours s’y mette ! »

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